14:15 ARCHITECTURE

Immeuble Clarté: la cure de jouvence est achevée

Construit en 1931-1932 sur la base des plans du Corbusier et de son cousin Pierre Jeanneret, la Clarté est un immeuble en copropriété de 48 appartements et bureaux. Installé dans l’un d’entre eux, le bureau d’architectes DVK a rénové plusieurs de ces objets chargés d’histoire désormais habités par des passionnés d’art et d’architecture.

«Avoir le privilège de travailler chaque jour dans un tel lieu est le rêve de tout architecte», estime Brigitte Jucker Diserens, co-fondatrice du bureau DVK qui occupe un espace de 220 mètres carrés avec terrasse au 1er étage de l’immeuble Clarté, depuis le début des années 2000. Situé aux numéros 2 et 4 de la rue Saint-Laurent, dans le quartier des Eaux-Vives, le bâtiment de huit étages signé Le Corbusier et Pierre Jeanneret a été construit au début des années trente par le serrurier et ferronnier d’art genevois Edouard Wanner. Cet édifice à ossature métallique soudée était exemplaire pour l’époque, puisque sa structure innovante rendait possible l’aménagement libre d’une grande variété de logements en libérant les murs intérieurs de toute fonction portante. Parmi les 48 appartements de tailles et de formes variées, Le Corbusier a notamment concrétisé son projet de «villas suspendues» avec 16 duplex. Unique œuvre du grand maître à Genève, La Clarté illustre à merveille quatre des cinq éléments de l’architecture moderne définie par Le Corbusier : le toit-terrasse, le plan libre, la fenêtre bandeau et la façade libre. Entièrement vitrée, cette dernière est dotée de fenêtres coulissantes sur billes.

Du moderne au contemporain

Passablement détérioré par les aléas du temps, le bâtiment classé aux Monuments Historiques depuis 1989 a subi ces cinq dernières années plusieurs travaux de restauration dans le respect de la construction et des matériaux pour restituer l’aspect général d’origine. Orchestré par le bureau de Chambrier & Dutheil et soutenu par la direction du Patrimoine et des sites, du Département des constructions et des technologies de l’information (DCTI) ainsi que par l’Office fédéral de la culture, le projet s’est concentré sur la restauration de l’enveloppe, des espaces communs (cages d’escaliers et cave) et la modernisation des installations CVSE.

En parallèle, plusieurs co-propriétaires ont entrepris de rénover leur appartement avec l’aide des architectes du bureau DVK. «La plupart d’entre eux sont des couples passionnés d’art et d’architecture. Ils sont conscients du privilège d’habiter une sorte d’œuvre d’art et souhaitent lui redonner son aura d’antan, tout en améliorant le confort lié à l’évolution des modes de vie», précise Brigitte Jucker Diserens qui reconnaît volontiers s’être sentie à la fois flattée et intimidée de transformer l’œuvre du maître. Dans ses cinq projets, le bureau s’est donné pour précepte de ne pas modifier les espaces définis par Le Corbusier dans le plan d’origine. Tous les changements proposés ont été conçus de manière réversible et les traces des partitions d’origine ont été conservées. La plupart des changements importants concernent les sanitaires et les espaces de cuisine. «Dans l’un des objets, nous avons transformé l’une des petites chambres en salle de bain et dressing attenants à la chambre principale. Nous avons également pris le parti de créer une cuisine ouverte sur le séjour. Dans un grand loft occupé par un philosophe, une bibliothèque a été réalisée sur mesure. Cet élément pivotant entre la pièce à vivre et la petite salle de douche est traité comme un meuble structurant l’espace», développe l’architecte.

Langage puriste

Au fil des pièces, des éléments de la philosophie du maître sont revisités selon une grille d’interprétation contemporaine. Brigitte Jucker Diserens et son équipe ont essayé d’imaginer ce qu’aurait lui-même choisi Le Corbusier en 2010, en privilégiant ainsi l’acier inoxydable et le verre, les tons gris et marrons. L’une des cuisines sera par exemple réalisée sur mesure en acier teinté selon les couleurs Le Corbusier. Certains sanitaires s’enrichissent d’une large douche italienne en plots de verre ouverte sur la ville. Dans l’un des duplex, les architectes ont poussé leur langage puriste à l’extrême pour retranscrire l’esprit de l’époque, en décorant l’espace avec des luminaires Le Corbusier et des pièces datant des années trente, telles que des fauteuils de Carlo Mollino et Harry Bertoia ou des chaises Hans Wegner, ainsi que des meubles plus récents aux lignes modernes classiques, comme une impressionnante table à manger de Jacques Robellaz.

Avec cette approche respectueuse des fondements du lieu et l’intégration sensible d’éléments contemporains, le bureau prouve qu’il est possible de perpétuer la philosophie du maître tout en inscrivant les nouvelles lignes de l’histoire présente et future de ce patrimoine architectural. (EV)

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