Un portique innovant pour la zone de failles du Gothard
Les travaux de construction du deuxième tube du Gothard se déroulent comme prévu. L’excavation de la zone de failles géologiques de Guspis a commencé. Pour affronter ce défi, le groupe Marti mise sur une solution innovante : un portique d’avancement spécialement développé en interne qui offre une sécurité et une qualité accrues tout en réduisant la durée des travaux.

Crédit image: Marti
Pour l’excavation de la zone de failles géologiques de Guspis dans le deuxième tube du Gothard, le groupe Marti a développé un portique d’avancement impressionnant : celui-ci pèse 285 tonnes et la plateforme de manœuvre mesure 31 mètres de long pour 11,3 mètres de large.
Le consortium composé des entreprises Marti Tunnel AG, Marti AG Bern, Mancini & Marti SA et Ennio Ferrari SA a été chargé par l’Office fédéral des routes (OFROU) de la construction du tunnel principal sud du deuxième tube du Saint-Gothard. Ce lot 341 comprend l’excavation du nouveau tunnel routier sur une longueur d’environ 7,8 km en provenance du sud. Une partie particulièrement exigeante des travaux consiste à percer la zone de failles géologiques de Guspis, située à 4,9 km du portail du tunnel à Airolo (TI).
Il s’agit d’un tronçon d’environ 380 mètres de long avec plusieurs bancs de kakirite, une roche tendre extrêmement broyée. Cette roche est sous tension tectonique. Ces zones « poussantes » ont tendance à converger – la pression du massif rocheux rétrécit à nouveau la cavité excavée. Si l’on parcourait une telle zone à l’aide d’un tunnelier, il pourrait rester coincé dans la roche déformée, et entraîner des retards importants dans l’échéancier des travaux.

Crédit image: Marti
Pour sécuriser l’excavation, les cintres en acier sont posés segment par segment à l’aide d’un manipulateur spécialement développé à cet effet. L’excavation est ainsi parfaitement sécurisée. Le poids de charge maximal du manipulateur est de 1,2 tonne, ce qui correspond à quatre segments de cintre.
C’est pourquoi
la zone de failles est creusée de manière conventionnelle – via une galerie
d’accès séparée – avant l’arrivée du tunnelier. Avec un diamètre de 15 mètres,
le profil d’excavation est nettement plus grand que le tunnelier de 12,39
mètres de diamètre. L’excavation supplémentaire permet de prendre en compte les
déformations du massif. Les forces générées sont redirigées par de lourds
cintres en acier fermés, des ancrages et du béton projeté. Ce n’est que lorsque
les forces du massif et la résistance du soutènement s’équilibrent que le tube
est revêtu d’une voûte en béton coulé sur place. Une section d’excavation aussi
importante s’accompagne de défis : même avec les plus grands engins
disponibles, les mineurs n’atteignent pas le faîte du tunnel depuis le radier.
Pour de telles sections transversales, on utilise généralement un avancement en
section divisée (calotte et stross). Par tronçon, la partie supérieure de la
section du tunnel est d’abord excavée, puis la partie inférieure. Mais pour supporter
les déformations de la montagne, il faut une fermeture rapide de l’anneau dans
la zone de failles de Guspis : le stross (partie inférieure de la section du
tunnel) doit être excavé et sécurisé immédiatement après la calotte (partie
supérieure). C’est pourquoi, après chaque abattage de 1 à 1,6 mètre, une rampe
devrait être remblayée pour pouvoir travailler dans la calotte. Ce processus
est fastidieux et chronophage
En accord avec le maître d’ouvrage, le groupe Marti a donc opté pour une
nouvelle procédure innovante : les ingénieurs de Marti Tunnel AG et de Marti
Technik AG ont développé et édifié un portique d’avancement d’une complexité
inédite. La structure de 285 tonnes permet de travailler à une hauteur de 6,6 à
7,8 mètres – et donc un avancement en parallèle dans les sections inférieure et
supérieure du tunnel.

Crédit image: Marti
Chaque cintre de sécurité en acier est composé de huit segments.
Un train de roulement avec huit pieds stabilisateurs à levage hydraulique permet de déplacer le portique en avant ou en arrière sur un support à rouleaux ; la longueur maximale de pas est de 3,1 mètres. La plateforme de manœuvre mesure 31,0 mètres de long et 11,3 mètres de large (voir encadré avec les dimensions caractéristiques). Un monte-véhicules d’une charge utile de 24 tonnes et une grue pour matériel servent à amener les engins de chantier et les matériaux de construction sur la plateforme. La plateforme est équipée de capteurs d’inclinaison et se nivelle d’elle-même, de sorte qu’elle reste toujours alignée à l’horizontale.
Appareil
innovant de pose de cintres
L’une des principales innovations est le manipulateur conçu par Marti Technik
AG. Il s’agit d’un appareil de pose de cintres qui permet d’utiliser rapidement
et précisément les cintres en acier pour sécuriser l’excavation. Sa structure
articulée rappelle une grande aiguille rotative qui permet de récupérer
directement sur le véhicule de transport jusqu’à quatre segments de cintre en
huit parties et de les comprimer à la bonne position à l’aide d’un bras
télescopique en une seule opération.

Crédit image: Marti
Le portique d’avancement permet de travailler simultanément sur deux niveaux – et donc un percement rapide en parallèle dans les sections inférieure et supérieure du tunnel.
La répartition du travail sur deux niveaux présente des avantages lors de l’utilisation des machines : au lieu de pelles mécaniques de 50 à 60 tonnes qui remplissent toute la section du tunnel, il est possible de travailler avec des modèles un peu plus petits. Une pelle pour tunnel Avesco TEC 20 est utilisée au niveau supérieur et une pelle pour tunnel Liebherr 950 qui a été électrifiée et transformée par Marti est utilisée au niveau inférieur. Marti mise pour la première fois sur une pelle électrique pour un chantier : l’Avesco TEC 20 électrifiée est même une fabrication spéciale, réalisée sur commande pour Marti.
Pendant l’exploitation, les pelles mécaniques sont raccordées au réseau électrique. Le chantier est équipé à cet effet d’une ligne de 1000 volts et d’une ligne de 400 volts. Le défi consiste à éviter que les câbles électriques ne gênent les travaux. En contrepartie, l’électrification rend le travail souterrain nettement plus écologique, plus agréable et moins coûteux. Le niveau sonore diminue et plusieurs dizaines de litres de diesel sont économisés par heure d’utilisation des pelles mécaniques. Grâce à la réduction de la production de suie et de poussière, l’effort d’aération est également considérablement réduit.
Plus sûr, plus
précis, plus rapide
Dans
l’ensemble, la stratégie d’avancement innovante du groupe Marti présente divers
avantages : la sécurité au travail s’en trouve considérablement améliorée.
Selon les calculs, le portique permettra d’économiser environ 14 000 kilomètres
de déplacement avec des engins lourds, surtout parce qu’il n’est pas nécessaire
de remblayer les rampes. Cela réduit le risque d’accident. De plus, tous les
postes de travail de l’avancement en parallèle restent accessibles en toute
sécurité et éclairés de manière optimale à tout moment.
La qualité est également mieux garantie : comme les mineurs se trouvent à proximité des surfaces d’excavation, la précision du travail augmente. Et l’équipe peut réagir plus rapidement à des situations exigeantes et variables. La convergence dans la zone de failles de Guspis est estimée à un mètre. C’est précisément dans ces zones que les avantages du portique d’avancement sont les plus importants : grâce au nouveau manipulateur, les lourds cintres en acier peuvent être mis en place plus rapidement et les éventuelles corrections sont plus faciles.
Enfin, l’avancement en parallèle sur deux niveaux aura un impact positif sur la durée des travaux : Marti Tunnel AG table sur un gain de temps compris entre 15 et 20 %. Au lieu d’un avancement quotidien de 50 à 60 centimètres à travers cette zone difficile, cette construction innovante et audacieuse devrait permettre d’atteindre jusqu’à 75 centimètres par jour.
Trois questions à… Stefan Wyss, chef de production Avancement
Monsieur Wyss,
comment vous est venue l’idée du portail d’avancement ?
La consigne
était d’effectuer l’avancement à pleine excavation avec fermeture d’anneau
complète. J’ai réfléchi à la manière d’améliorer la sécurité au travail et
d’accélérer le soutènement. C’est là qu’est née l’idée de travailler en
parallèle sur deux niveaux. Je me suis inspiré de rapports historiques sur le
premier tunnel édifié au XIXe siècle sous la Tamise à Londres : à l’époque
déjà, les travaux étaient effectués à partir d’une plateforme, bien entendu
sans gros engins. Cela a permis de travailler sur trois niveaux, chacun occupé
par une équipe de dix personnes.
Quels sont les
principaux avantages du portique d’avancement ?
Le portique
d’avancement a des effets extrêmement positifs sur la sécurité au travail. Il y
a moins de trajets avec des engins lourds, ce qui réduit le risque d’accident.
En utilisant des pelles électriques, nous réduisons en outre la formation de
suie et de poussière ainsi que les besoins d’aération. Dans le même temps, la
qualité des travaux augmente, car les mineurs sont plus proches des surfaces
d’excavation et peuvent ainsi exécuter les travaux avec plus de précision.
Quel est
l’impact du portail d’avancement sur la durée des travaux ?
Nous partons du
principe que l’avancement en parallèle permettra un gain de temps de 15 à 20 %.
Notre objectif est d’atteindre une avance journalière pouvant atteindre 75
centimètres. Avec un avancement classique en section divisée (calotte et
stross) – et le remblai nécessaire des rampes –, il ne serait guère possible de
dépasser 50 à 60 centimètres par jour dans cette zone difficile.
Trois questions à… Toni Hauert, chef du service Construction de coffrages
et de machines spéciales, Marti Technik AG
Monsieur
Hauert, comment le portail d’avancement est-il structuré ?
Le portique
pèse 285 tonnes et permet de travailler à une hauteur de 6,6 à 7,8 mètres. La
plateforme de travail mesure 31 mètres de long et 11,3 mètres de large. Elle
repose sur un train de roulement doté de huit pieds stabilisateurs à levage
hydraulique. Le portique peut ainsi être déplacé en avant et en arrière sur un
support à rouleaux avec des longueurs de pas pouvant aller jusqu’à3,1 mètres.
La plate-forme est équipée de capteurs d’inclinaison et se nivelle d’elle-même.
Les machines de chantier et les matériaux sont amenés sur la plateforme de
travail à l’aide d’un monte-véhicules et d’une grue pour matériel.
Qu’est-ce qui
est particulièrement innovant dans ce portique ?
Le manipulateur
spécialement développé par Marti Technik AG. Il s’agit d’un appareil de pose de
cintres qui place les cintres en acier de manière rapide et précise pour
sécuriser l’excavation. Il s’agit d’une pièce unique capable de récupérer
directement sur le véhicule de transport jusqu’à quatre segments et de les
comprimer à la bonne position en une seule étape à l’aide d’un bras
télescopique.
Comment
monte-t-on une structure d’un tel métré dans un tunnel ?
Le montage a
été un véritable défi. Les différents éléments ont dû être fabriqués à des
dimensions spécifiques permettant le transport dans le tunnel par camion et ont
été déplacés à l’aide de grues spéciales.Après le
montage, nous avons dû hisser la plateforme de manœuvre petit à petit jusqu’à
une hauteur de travail de plus de 7 mètres en la surélevant. Comme il y a peu
de place dans le tunnel, il y a eu un ordre de montage précis : chaque pièce
devait se trouver exactement au bon endroit.
Le portique d’avancement en détail
Le portique d’avancement conçu par le groupe Marti pour le lot 341 lors de la construction de la seconde galerie du deuxième tube du Gothard en chiffres.
Plateforme de manœuvre et châssis porteur. Longueur : 31,0 mètres, largeur : 11,3 mètres, hauteur de la plateforme de travail : 6,6 à 7,8 mètres, poids de la construction en acier : 285 tonnes, train de roulement avec 8 stabilisateurs, longueur de pas maximale 3,1 mètres, déplacement transversal hydraulique : +/- 2,0 mètres.Support de palier.
Poids : 3 tonnes /pièce, capacité portante : 1600 kNMonte-véhicules.
Poids propre : 16 tonnes, charge utile : 24 tonnes, longueur × largeur plateforme élévatrice : 13 mètres x 3,5 mètres ; temps par course : env. 6 minutes.
Grue pour matériel. Portée horizontale : 10,05 mètres, capacité de charge sur 10,05 mètres : 1,37 tonne; pivotante et télescopique.Manipulateur. Course du chariot : 4,3 mètres, course du manipulateur : 4,2 mètres, poids maximal du chargement : 1,2 tonne (4 éléments de cintre)