A Cheseaux, Pulse préfigure la densification industrielle

Fini l’époque des halles qui s’étalent à perte de vue. A l’heure de la densification, les zones industrielles n’échappent pas à la règle. Pour rentabiliser le sol, il faut concentrer les activités. Sur les hauteurs de Lausanne, le complexe Pulse qui va être inauguré le 16 mai se veut exemplaire. Dédié aux sciences de la vie et de l’innovation, il propose 43’000 m² de surfaces aménagées sur quatre niveaux et deux sous-sols. Une gare logistique avec douze quais de chargement poids lourds sépare les deux bâtiments.

Crédit image: Photodrone.pro, Pedro Gutiérrez

Pulse se distingue par les affectations différentes de ses niveaux. Le rez-de-chaussée offre une hauteur sous plafond de 5,8 m pour des espaces de production ayant de grands besoins de technique en plafond. Les trois étages supérieurs de hauteurs moindres sont destinés aux espaces de production, aux laboratoires de recherche et développement et à l’administratif.

En Suisse, la densification est une priorité. Notamment celle qui cherche à exploiter de la manière la plus efficace possible les surfaces urbaines déjà existantes pour préserver le milieu bâti. Les exemples de surélévation dans nos cités ne manquent pas. Mais la politique nationale d’organisation du territoire cherche également à améliorer les zones d’activité pour les rendre plus denses. En clair, le temps des halles industrielles qui s’étalent sur des surfaces à n’en plus finir est révolu. Désormais, il faut concentrer les activités pour optimiser l’utilisation du sol.

Dans ce domaine, le complexe Pulse, en pleine zone industrielle de Cheseaux-sur-Lausanne, se veut exemplaire : un bâtiment référent pour le canton de Vaud. Ce centre d’innovation est conçu pour répondre aux besoins des entreprises grâce à une superposition des infrastructures dans les étages au lieu de se développer de manière traditionnelle de plain-pied. Il va être inauguré officiellement le 16 mai prochain.

Couteau suisse high-tech pour Tetris géant
Pulse se présente comme un ensemble mixte pour activités industrielles et administratives, dédié aux sciences de la vie et de l’innovation, c’est-à-dire aux technologies de la santé, entreprises de la pharma, MedTech et autres Biotech. «  Notre projet, c’est un couteau suisse. Il se veut centre de production, mais est conçu également pour la recherche et développement ainsi que l’administratif, explique Quentin Armand, letting manager pour la Suisse romande du maître d’ouvrage Epic. Notre société immobilière est cotée en bourse avec 1,6 milliard d’actifs. Nous achetons ou développons des biens et les gardons pour les mettre en location. Nous avons été les premiers investisseurs du Biopôle de Lausanne. En ce qui concerne Pulse, nous l’avons développé 100 % à risque, sans le moindre locataire au départ du projet. » Il a fallu plus de 10 ans d’études – elles ont démarré en 2013 – pour créer les droits à bâtir de cette zone d’activité nouvelle génération. Pulse a pu se développer avec un volume potentiel de 7 m³ par m², sur quelque 18 m de hauteur. A l’arrivée avec 43’000 m² de surfaces aménagées, ce projet offre à ses clients potentiels une fonctionnalité et adaptabilité exceptionnelle. « Notre souci a été de répondre au défi de la densification en amenant des activités dans les étages de la manière flexible, poursuit Quentin Armand. Pour cela il était indispensable d’être le plus modulaire possible ; notre complexe est un véritable Tetris géant capable de répondre à tous les cahiers de charge. »

Crédit image: Jean-A. Luque

Pulse propose un cadre de travail agréable avec beaucoup de lumière naturelle et une vue dégagée sur la campagne et les forêts, mais surtout des infrastructures de pointe modulables. Le complexe est organisé autour de noyaux autonomes, mais interconnectés.

Les travaux ont démarré en 2021 avec une année pleine de travaux préparatoires. 150’000 m³ de terres ont été excavés sur 11 m de profondeur. Plus de 10’000 mouvements de camion ont été nécessaires pour évacuer tous ces matériaux, dont 20 000 m² pollués ont dû être traités. Le lieu a longtemps été une déchetterie sauvage.

Situé à cinq minutes des autoroutes A1 et A9 en entrée de commune de Cheseaux-sur-Lausanne, Pulse prend place sur une zone industrielle qui a été étendue pour les besoins du projet. Il est constitué de deux hôtels industriels, l’un de 16 m de haut, l’autre de 18 m, qui se font face avec au centre une gare logistique offrant douze quais de chargement poids lourds de part et d’autre.

Les deux bâtiments sont reliés par un sous-sol de deux niveaux dédiés à la technique, au parking (450 places + parc vélo pour 180 cycles) et au stockage. Le niveau -1 propose également des zones de déchargement pour les camionnettes avec une hauteur libre de 4,4m. Le radier du sous-sol a une surface de 13’000 m².

De l’industriel lourd à l’administratif
Le rez-de-chaussée offre une hauteur sous plafond de 5,8 m et sa dalle est conçue pour des charges au sol de 2 tonnes /m². Son affectation est pensée pour des salles blanches ou des espaces de production ayant de grands besoins de technique en plafond. Quant aux trois étages supérieurs avec des hauteurs jusqu’à 4,4 m, ils sont plus particulièrement dédiés aux espaces de production, aux laboratoires de recherche et développement et à l’administratif. La trame verticale de vitrage accompagne ces affectations théoriques et varie au fur et à mesure qu’on s’élève, passant de l’industriel lourd, à l’assemblage jusqu’à la gestion en sa partie sommitale.

Dans chaque bâtiment, des patios centraux végétalisés, non accessibles, font office de puits de lumière géants et apportent une note de nature et de délassement au cadre de travail. Des terrasses, dont une de 320 m², offrent d’impressionnantes percées sur l’extérieur aux 2e étages.

Crédit image: Jean-A. Luque

Douze quais adaptés aux poids lourds permettent le chargement et déchargement de matériel pesant et imposant directement dans les deux hôtels industriels.

Entièrement en béton, avec une façade métallique, Pulse a nécessité 46’000 m³ de béton, fabriqué in situ, ce qui représente plus de 100 millions de kilos. Auxquels il faut ajouter 5, 5 millions de kilos d’acier et 13’500 m² de parois vitrées.

Le complexe est organisé autour de 8 noyaux identiques (4 par bâtiment). Ces unités autonomes, mais interconnectées, sont toutes équipées d’un monte-charge de 4 t avec une porte de 1,8 m sur 2,8 m, d’un ascenseur de 1 t, de gaines techniques et système de ventilation, ainsi que d’une entrée séparée. Les surfaces sont entièrement flexibles grâce une trame constructive de 8 × 11 m, soit presque 90 m² entre poteaux.

Crédit image: Jean-A. Luque

Au premier sous-sol, une autre zone de déchargement est prévue pour les camionnettes.

Des écoulements pour les eaux de process /industrielles sont incorporés dans les dalles tous les 40 m². L’ouverture des dalles est possible à tous les niveaux ; ces trémies permettent d’atteindre des doubles hauteurs jusqu’à 10,7 m, ce qui permet d’installer des équipements hautement spécialisés tel un bioréacteur. « Les façades, ajoute Quentin Armand, sont démontables pour permettre l’introduction ou l’évacuation d’équipements volumineux. Et il est également possible de remplacer les vitrages par des panneaux métalliques. »

Pulse est labellisé Minergie et BREEAM (Building Research Establishment En-vironmental Assessment Method). Cette dernière certification, très prisée à l’international, valorise l’énergie grise et l'empreinte carbone des bâtiments.

Quasi-autosuffisance énergétique
Pas moins de 80 sondes géothermiques jusqu’à 280 m de profondeur ont été posées, ce qui représente 22 km de tuyauteries pour alimenter le bâtiment en chaud et en froid. Couplés à cet équipement, plus de 1000 panneaux photovoltaïques en toiture permettent au centre une quasi-autosuffisance énergétique.

La puissance électrique disponible est à la hauteur des attentes des clients. Trois transformateurs de 1 MW livrent 33 W/m². Et tout est prévu pour doubler les installations si nécessaire. La ventilation peut renouveler l’air du complexe jusqu’à 10 fois par heure ; cela représente 16’000 m³/h pour chaque noyau. Une réserve de 60’000 m³/h permet d’installer à tout endroit n’importe quel processus industriel jusqu’à des salles blanches de grade A certifiées ISO 5.

« Pour être attrayants, la modularité et des infrastructures de pointe sont indispensables, poursuit Quentin Armand. Les sociétés cherchent des bâtiments efficients. Mais cela ne suffit pas, il faut aussi offrir tout un écosystème de qualité aux utilisateurs. En effet, nous parlons ici de talents, de personnel qualifié et exigeant. Pour les attirer, nous aurons aussi sur site un restaurant de 900 m² avec 240 places, capable de servir 400 couverts par jour. Nous aurons aussi une crèche privée pour 45 enfants. Et encore, un fitness de 250 m² au sommet d’un des bâtiments. » A terme, Pulse devrait accueillir quelque 800 employés sur site. Le projet a coûté 130 millions de francs.