14:40 TECHNIQUE

L’ancien site lausannois de la Poste entame sa métamorphose

Après le chantier titanesque du quartier du Flon, Mobimo développe désormais l’ancien site administratif et de tri de la Poste (Ouchy 4-6) qui totalise 30 000 m2 de surface de plancher au cœur de Lausanne. Le bâtiment principal est en cours de rénovation totale et prévoit, sur 6 étages, la création de bureaux.

Les échafaudages empêchent encore de découvrir sa nouvelle enveloppe. Mais le bâtiment de l’ancien site administratif de la Poste a déjà entamé sa mue contemporaine. Il sera investi par ses premiers occupants au mois d’avril prochain pour l’exécution de leurs travaux d’aménagements intérieurs. La partie visible constituée par l’immeuble rénové de six étages n’est néanmoins qu’une partie de l’iceberg. Implanté sur une méga dalle, le site représentant une parcelle de 12 600 m2 et environ 32 000 m2 de surface de plancher, comprend également cinq sous-sols dédiés au tri postal, l’ancienne halle de tri en surface étant une annexe. Le développement de cette zone urbaine sous-exploitée, à deux pas de la gare CFF, pourrait donner une nouvelle image beaucoup plus dynamique à ce quartier en pleine expansion. Et c’est justement ce qui a séduit Mobimo qui s’en est porté acquéreur en 2010. Après le vaste chantier du Flon, le groupe entame un nouveau défi de développement prévu, cette fois encore, sur plus d’une décennie. «Ce pôle de constructions majeur fait l’objet d’une réflexion globale en vue de redynamiser le quartier de la gare. La transformation est prévue en plusieurs étapes», explique Roman Loser, manager de projet chez Mobimo. Entre temps, le site est actuellement occupé par plusieurs locataires. La «Poste» occupe environ 9 750 m2 pour les guichets postaux, le centre de tri lettres de Lausanne, Prilly et Pully et des bureaux. Le magasin de sport Bächli occupe deux niveaux donnant sur l’avenue d’Ouchy d’env. 2300 m2. Finalement, le bureau d’architecture Itten+Brechbühl SA occupe une halle shed de 1000 m2. De plus, des travaux de rénovation ont été menés sur l’ancienne halle de tri située sur la galette afin d’y accueillir temporairement la banque MIG qui a transféré son siège neuchâtelois à Lausanne et investira 4 étages du bâtiment administratif en cours de rénovation d’ici fin 2013.

Rénovation totale

Première opération d’envergure, le bâtiment administratif existant nécessitait une rénovation totale. Au programme: la rénovation de l’enveloppe et la mise en place d’un nouveau concept énergétique répondant au standard Minergie, ainsi que l’aménagement gris de surfaces administratives, avec deux entrées et deux montées verticales. Mandaté en 2011 par Mobimo, le bureau lausannois d’Itten+Brechbühl SA s’est chargé de la planification générale. L’enjeu du projet concernait en priorité la nécessité de trouver des solutions techniques pour maîtriser les normes relatives aux aspects feu, phonique et physique du bâtiment. Il s’agit également de concevoir pour ce volume donné une mise aux normes énergétiques et un principe de façade contemporain qui ancre le bâtiment dans une nouvelle affectation pour 25 ans.

Bâtiment classé avec une note 5

Construit dans les années soixante, le bâtiment présente une structure à cadres métalliques soudés à partir du rez-de-chaussée. C’est sur ces cadres qu’a été coulée, avec parfois des connexions rigides, une dalle en béton tantôt nervurée tantôt lisse, dont l’épaisseur varie entre 8 cm et 30 cm pour les dalles à caisson. Sa structure secondaire consiste en une façade rideau accrochée à la structure métallique, et à laquelle avait été suspendu dans le cadre d’une rénovation dans les années 1990 une seconde façade pour une mise aux normes acoustiques et énergétiques. Tous les éléments d’aménagements intérieurs étaient non-porteurs, afin de rendre possible différentes configurations administratives. Le bâtiment est classé avec une note 5, ce qui signifie que c’est un bâtiment important dans le paysage lausannois. Les Monuments Historiques et le Service d’Architecture de la Ville de Lausanne ont souhaité qu’il conserve une même expression architecturale.«Cette donnée était un challenge esthétique. Actuellement, l’économie dicte une morale très claire par rapport aux rénovations de façades. Elle sous-entend qu’elles doivent être légères, lisses et avoir le moins d’éléments possible pour réduire le nombre de joints. Or, ce n’était pas possible de réaliser une façade en verre collé ou une double peau qui aurait fait perdre l’identité architecturale de l’objet», explique Tomas Zenker, architecte en charge du projet pour le compte d’ Itten+Brechbühl.

Le Maître d’ouvrage a d’abord décidé de conserver dans la mesure du possible le système primaire et secondaire, notamment les façades existantes après démontage des façades rapportées datant des années 1990. Néanmoins, au moment du démontage de ces dernières, la présence d’amiante a poussé les intervenants vers la reconstitution totale de la façade. «Tout le défi résidait dans le fait de déshabiller et rhabiller l’existant avec une technologie simple, contemporaine et efficace du point de vue thermique. Il fallait aussi donner une image architecturale en accord avec celle des années 1960», relève l’architecte. Une contrainte de taille a compliqué la conception des façades: la dalle sur laquelle le bâtiment est implanté ne peut pas supporter de lourdes charges, et donc aucun élément de grande portée par convoi spécial n’est réalisable. Seule une préfabrication des éléments de façade était envisageable.

500 cadres en aluminium

L’entreprise Sottas SA a proposé de monter des éléments préfabriqués de 1,8 m de large et de 3,6 m de haut, par bandes verticales comme un domino, pour respecter la trame secondaire du bâtiment, à savoir les verticalités très importantes de l’expression architecturale originelle. Il s’agit d’un système de cadres métalliques comprenant une structure primaire, un caissonnage de remplissage pour le contrecœur avec son isolation et son habillage en tôle, son système de fenêtre métal avec un petit ouvrant latéral et les stores extérieurs. Au total, il y a 500 cadres aluminium de dimensions identiques avec un ouvrant à la française inséré tous les deux éléments. Le remplissage est composé de verres triples pour une valeur thermique Uw moyenne de 0,85 W/m2K. La teinte blanche du bâtiment et la teinte grise du rez-de-chaussée ont finalement été validées par la Ville de Lausanne, en coordination avec l’architecte, le Maître d’ouvrage et M. Claude Augsburger, coloriste et artiste contemporain. La façade sud a pour particularité d’être vitrée sur toute la hauteur avec une vue imprenable sur le Lac. Elle est réalisée avec un système en poteaux-traverses et des verres triples sans fixations verticales visibles, soulignée d’un bandeau blanc pour les caissons de stores. Le côté Nord est composé d’une façade à cassettes en tôle ventilée pour l’habillage de la maçonnerie avec un élément vitré par étage dans la cage de l’escalier. Les vitrages de l’attique sont réalisés à l’image des façades principales avec un bandeau supérieur relevé vers le côté Sud, ainsi qu’un garde-corps vitré toute hauteur sur la terrasse qui prononce la visibilité de la façade Sud. Le rez-de-chaussée est également composé d’un système en poteaux-traverses et de verres triples sur toute la hauteur. L’entrée principale au Nord est munie d’un sas et de portes automatiques. Les plans sont actuellement en cours d’élaboration pour cette zone. La pose est prévue au printemps 2013.

Tracés techniques déposés

Concernant le concept CVSC, tous les tracés techniques ont dû être déposés. «Comme il était impossible de récupérer le système CVSC existant, nous avons pris le parti de dissocier le bâtiment administratif du reste du socle», développe Tomas Zenker. Le bâtiment a été relié au chauffage à distance. «Le traitement d’air et le système de ventilation en double flux ont été dissociés de la production d’eau chaude et du système électrique. La centrale de ventilation est installée en toiture, tandis que les deux autres sont restées au sous-sol. Ce choix nous a permis de répartir les charges techniques du bâtiment et de récupérer une partie des gaines verticales pour réduire les percements dans les dalles afin de ne pas réduire leur rigidité horizontale», détaille Tomas Zenker.

Ne rien changer à l’équilibre existant

En résumé, la technique du bâtiment est liée à deux colonnes verticales, l’une au nord et l’autre au centre, ce qui a permis de dissocier techniquement ces deux parties du point de vue de la ventilation et de la distribution de chauffage en favorisant une économie de 50 % de gaines techniques verticales qui ont pu être pourvues pour tous les autres réseaux. L’une des contraintes imposée par le système primaire métal béton était de ne rien changer à l’équilibre existant. «Lors de chaque percement des dalles en béton destinées au passage de la ventilation, un renforcement a été fait avec de la fibre de carbone collée sur le béton, afin d’éviter de gros sommiers métalliques ou béton armé et des retombées sous dalle qui compliquent l’architecture», relève David Martin, ingénieur civil associé au sein du bureau Sancha + Associés SA basé à Yverdon-les-Bains, qui s’est également chargé de l’étude parasismique de l’ouvrage.

INTERVIEW EXPRESS

Sonia Romano, directrice adjointe Mobimo Suisse Romande

Mobimo a orchestré la mue contemporaine du quartier du Flon. Cette nouvelle section urbaine est en voie d’achèvement. Quel bilan en tirez-vous ?

Incontestablement, le Flon est devenu le cœur contemporain de Lausanne. Grâce à la construction des trois bâtiments des Pépinières, nous allons finaliser une nouvelle étape du développement de ce quartier aux multiples visages culturel, commercial et de loisirs. Ce quartier sera toujours en mouvement et nous ne pouvons tirer des bilans définitifs mais je crois que nous pouvons être fiers du travail accompli et de la réussite du Flon.

Les sites sous-exploités avec un fort potentiel de développement semblent être les points clés de la stratégie d’acquisition de Mobimo. Quels sont les projets d’envergure qui ont été initiés à l’échelle suisse ?

Nous sommes en effet très attentifs au potentiel de développement d’un site ou d’un quartier selon la dynamique urbaine environnante. Mais nous ne contentons pas de cela, nous allons à chaque fois plus loin dans notre réflexion afin d’amener une véritable plus-value architecturale, économique et sociale pour toujours mieux vivre sa ville. Nos projets en Suisse alémanique, tels que la fameuse Mobimo Tower à Zürich et le quartier Aeschbach à Aarau, illustrent notamment cet état d’esprit.

Comment gérez-vous les enjeux et les défis de ce type de projets dont la transformation s’effectue sur plusieurs années ?

Notre réflexion s’effectue en effet dans le cadre d’une vision à long terme que nous élaborons et que nous partageons en totale collaboration avec les autorités publiques communales et cantonales. Il s’agit là d’un vrai partenariat. Nous attachons également beaucoup d’importance au dialogue que nous entretenons avec les habitants des quartiers concernés et nos locataires.

Pourquoi vous êtes-vous intéressés au site de la Poste ?

Il est extrêmement bien placé, proche de la gare et du futur M3, avec, en ce qui concerne l’immeuble administratif, une vue imprenable sur le lac, la ville et les Alpes. C’est une image de marque pour une entreprise. De plus, le site est très vaste puisqu’il s’étend en sous-sol jusqu’à la gare et s’intègre dans un grand projet ambitieux de développement de toute la zone. Nous sommes en discussion avec les CFF et la ville de Lausanne pour l’aménagement de ce quartier. Notre projet devrait compléter harmonieusement la métamorphose globale du quartier de la gare, incluant notamment le futur Musée Cantonal des Beaux-Arts.

Quelles vont être les grandes phases de développement du projet ?

Il y aura cinq grandes phases: la phase de conceptualisation qui permet de définir les grandes lignes du projet et qui comprend les études de faisabilité; ensuite la phase d’élaboration d’un PPA qui sera suivie par une phase de consultation et de procédure d’autorisation du PPA; enfin interviendra la planification finale et la dernière phase, celle de la construction du site. Il s’agit d’un projet d’envergure qui prendra des années et dont le début des travaux interviendra probablement à l’horizon 2020.

Les intervenants

Maîtres d’ouvrage

Mobimo

Planificateur général

Itten+Brechbühl SA

Pilotage des travaux

Techdata SA

Ingénieur civil

Sancha+Associés SA

Ingénieur électricité

Perrin Spaeth Bureau d’ingénieurs conseils SA

Ingénieur CVC

Jakob Forrer SA

Ingénieur sanitaire

Schumacher Ingénieurs conseils SA

Ingénieur Sécurité Feu

Christian Meldem

Ingénieur acoustique

Gartenmann Engineering SA

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