Sion prépare un écrin à toute épreuve pour les soins aigus
Avec son extension en forme de L, coiffée de deux héliports, le site sédunois de l’Hôpital du Valais vise à maximiser le fonctionnement de ses services critiques. Le chantier avance en parallèle de l’exploitation pleine et entière du bâtiment hospitalier actuel. Le déménagement des services et des urgences est prévu pour le début 2027.

Crédit image: Bureau Ferrari Architectes, Hôpital du Valais, Canal9
L'extension est bâtie pour envelopper le bâtiment hospitalier actuel, tout en s'intégrant dans son voisinage.
Construire un nouvel hôpital oblige à imaginer une conception architecturale établie pour des dizaines d’années à une progression bien plus rapide des besoins de ses utilisateurs. Le Centre hospitalier du Valais romand dont le site de Sion est en plein agrandissement est confronté depuis cinq ans à cette équation. Ce projet sédunois est le fruit d’un dialogue permanent entre le maître d’ouvrage, le corps médical et infirmier, ainsi que les services d’urgence. A l’arrivée, dès le printemps 2027, les différents partenaires pourront bénéficier d’un nouvel écrin dans un bâtiment qui compose avec les besoins de chacun.
A n’en pas douter, à 18 mois de l’échéance finale, le nouvel établissement de l’hôpital de Sion ne montre de loin pas encore son visage définitif. Même si les couloirs et autres salles augurent déjà une construction lumineuse et accueillante, ils sont encore nus, privés de leurs équipements et aménagements.
« L’extension est pleinement adaptée aux nouvelles normes parasismiques », précisent Ursula Kohli et Steve Crettenand, les représentants du maître d’ouvrage. En effet, outre la nécessité de faire face à l’augmentation démographique et de proposer les nouvelles méthodes thérapeutiques, le projet répondait aussi à une motion déposée en 2014 déjà auprès du Grand Conseil valaisan. Le Conseil d’Etat décidait la même année de regrouper les structures hospitalières au plan cantonal et, dans la foulée, de mieux protéger les bâtiments publics contre les risques de tremblement de terre, toujours présents en Valais. Parallèlement, l’hôpital de Sion se sentait à l’étroit. D’où cette volonté de s’agrandir, et même de regrouper les offres en matière de santé. Finalement, canton bilingue oblige, les deux sites de Sion et de Brigue ont été privilégiés pour accueillir une offre aussi complète que possible. Dans le Valais romand, la formation HES dans les professions affiliées vient épouser cette dynamique en construisant actuellement un nouveau campus juste à côté de l’hôpital sédunois (lire encadré). La Ville de Sion en a logiquement profité pour relocaliser ses services d’ambulance sur le site hospitalier. Les chantiers se déroulent en parallèle, sur un site en pleine exploitation.

Crédit image: Photodrone.pro, Pedro Gutiérrez
Les façades du bâtiment sont équipées de vitrages fixes avec des ouvrants latéraux qui assurent l’aération naturelle des locaux.
Après l’octroi du permis de construire en 2019, l’Hôpital du Valais et le bureau Ferrari Architectes ont pu passer à la phase de réalisation du nouveau bâtiment en forme de L en 2020. Un chantier rythmé et freiné, à ses débuts, par la pandémie du coronavirus. Mais les travaux avancent. Le déménagement des différents services pourra avoir lieu au printemps 2027. Par une opération coup de poing, pour ne pas interrompre l’activité hospitalière. Tout se prépare déjà minutieusement, par des discussions constantes entre responsables du chantier et futurs utilisateurs du bâtiment.
Cote
du socle intégralement reprise
Le concept architectural insère le nouveau bâtiment au sud et à l’ouest de
l’existant. D’un volume compact, l’extension de l’hôpital reprend la cote
maximale du socle du complexe. Elle forme avec l’établissement actuel une cour
autour de laquelle se développe tout le système distributif. Elle clarifie
aussi l’entrée principale en la réorientant vers le nord. Une disposition qui
soude l’ancien bâtiment au nouveau.
Les architectes de l’extension ont dû faire face aux contraintes posées par l’agencement de l’hôpital actuel. Notamment pour créer des liaisons efficaces entre les deux blocs, ancien et nouveau. Ce qui va retarder un peu l’aménagement définitif de la circulation des personnes au sein du complexe. Il n’est en effet pas possible de tout préparer avant le déménagement des patients et du personnel soignant dans une structure fluide et rationalisée. C’est un leitmotiv qui se retrouve à chaque étage de la nouvelle extension.

Crédit image: Photodrone, Pedro Gutiérrez
La plupart des installations techniques sont perchées au-dessus du deuxième étage du bâtiment. Elles comptent de très nombreux blocs de ventilation.
La nouvelle construction repose sur un radier renforcé de 1 m 60 d’épaisseur en moyenne. Il est construit dans une zone alluvionnaire, traversée par des cours d’eau et donnant sur la nappe phréatique. Un souci de plus pour la construction de locaux à l’abri des infiltrations d’eau et pour certains, isolés hermétiquement du monde extérieur. Cela a conduit à placer les 14 salles d’opération, ainsi que les services des soins intensifs, de la gynécologie obstétricale et d’anesthésie au deuxième niveau. Une localisation qui, en outre, offre l’avantage d’être plus aisément accessible depuis le toit et ses deux héliports.
La
tôle perforée apporte la nature
Modélisé en BIM, le bâtiment est construit en béton, et coiffé d’une charpente
métallique. Ses 5600 m² de façades sont équipés de vitrages fixes avec des
ouvrants latéraux qui facilitent l’aération naturelle des locaux. Des tôles
perforées en aluminium dans quatre nuances de vert apportent la nature à
l’intérieur. Même si la fonctionnalité reste de mise, les architectes ont ainsi
pu apporter leur touche personnelle. La construction est percée de cinq patios
bordés de 6600 m² de façades en poteaux-traverses. Elle compte plusieurs cages
d’escaliers et de multiples ascenseurs et monte-charges, adaptés au transport
des patients, y compris les plus lourdement médicalisés.

Crédit image: Photodrone.pro, Pedro Gutiérrez
L’accès aux urgences depuis le toit se justifie par le fait que le bloc opératoire et les soins intensifs sont situés au deuxième étage du bâtiment.
Le sous-sol accueille les installations techniques de base. Ce qui est loin d’être anodin. Le chauffage sera raccordé au réseau à distance conçu d’après la chaleur récupérée par la station d’incinération des déchets d’Uvrier, près de Sion. D’ailleurs, c’est l’intérêt marqué de l’Hôpital du Valais pour un chauffage à distance qui a sans doute incité la capitale valaisanne à miser sur cette forme d’énergie. « En temps ordinaire, nous n’aurons qu’une seule salle de distribution de chaleur dans notre nouveau bâtiment », indique Ursula Kohli. Cependant, le caractère sensible du site hospitalier oblige à la création de redondances en matière d’eau, de ventilation et de chauffage. Sans compter l’alimentation électrique, avec des génératrices prévues pour une semaine d’autonomie. Le spectre d’un séisme ou de catastrophes naturelles d’envergure n’est jamais très éloigné en Valais. La duplication des installations touche aussi le chauffage, avec la présence de chaudières d’appoint à mazout dans le bâtiment existant. L’énergie solaire est aussi présente, sur le toit du parking couvert attenant.

Crédit image: Photodrone.pro, Pedro Gutiérrez
Le bâtiment est « percé » de cinq patios qui ne serviront que d’espace d’entretien et de source de lumière naturelle.
Encore au sous-sol, une salle aux dimensions impressionnantes abritera les stocks de produits pharmaceutiques nécessaires à l’ensemble des sites de l’Hôpital du Valais. Le local est bordé d’une unité de laboratoire pour la composition des mélanges les plus délicats. Le niveau compte aussi une unité de physiothérapie, avec bassin thérapeutique, et des locaux de stockage. Le bâtiment est équipé d’un système de transmission pneumatique interne permettant le transport d’échantillons sanguins à l’abri des chocs. Une salle du sous-sol est aussi réservée à la gestion de la distribution des gaz médicaux.
Deuxième
étage totalement sécurisé
Le rez-de-chaussée est réservé à l’accueil du public avec une nouvelle
réception centrale, aux urgences – y compris celles en matière pédiatrique, qui
manquaient encore à l’Hôpital du Valais, aux services de radiologie et
d’endoscopie, ainsi qu’aux structures de jour. Le premier étage comprend une
zone de consultation, les unités de chirurgie, de médecine et de néonatologie,
ainsi que les zones de soins continus et de dialyse. Le deuxième étage est
réservé aux soins intensifs et aux salles d’accouchement, ainsi qu’aux
opérations chirurgicales et à leurs équipements techniques. Il n’est donc
accessible par sas qu’au personnel ou aux patients, naturellement. La
localisation en hauteur des services critiques de l’établissement hospitalier
obéit à des raisons essentiellement pratiques. L’étage se situe à mi-chemin de
l’arrivée des urgences aériennes, par hélicoptère, et de celles des patients
acheminés par ambulance. La circulation des personnes dans le bâtiment gagne
ainsi en fluidité.

Crédit image: Hôpital du Valais
Le chauffage du bâtiment provient de l’usine d’incinération des déchets d’Uvrier. Le caractère sensible d’un hôpital a obligé le maître d’ouvrage à prévoir des redondances.
Après un niveau technique – « nous ne comptons plus le nombre de monoblocs de ventilation, », sourit Ursula Kohli – la toiture est munie de deux héliports. Ces plateformes circulaires sont équipées d’un dispositif antigel et de buses pour prévenir les incendies. Des passerelles les relient directement aux ascenseurs donnant accès à l’étage des blocs opératoires et aux urgences.

Crédit image: Photodrone.pro, Pedro Gutiérrez
Touche artistique bienvenue, l’œuvre d’Eric Lanz glorifie l’art du soin en façade.
Cerise sur le gâteau, l’extension a aussi servi de terrain d’expression artistique. Eric Lanz y a réalisé une œuvre dédiée à l’art du soin, en utilisant divers matériaux comme le talc, la gaze, la ouate ou de la pommade pour les imprimer sur les différents vitrages du bâtiment. L’interface entre la peau humaine et le bâtiment est donc complète.
Le bâtiment actuel de l’hôpital sera donc reconverti pour n’accueillir à terme que des lits stationnaires, en plus de la cafétéria. L’extension permettra l’accueil de 400 patients, au lieu des 250 actuels. Elle rationalisera aussi l’activité d’intervention en matière de soins aigus. Une passerelle piétonne relie déjà le site au centre-ville de Sion. « Ce nouveau bâtiment est absolument nécessaire en Valais », expliquent encore les deux responsables du projet. Une étape qui sera pleinement opérationnelle en 2027. L’Hôpital du Valais intègre déjà des possibilités d’agrandissements ultérieurs.