La Maison de l’Ancre rejoint les bâtiments protégés du patrimoine genevois
Avec son mur-rideau emblématique, la Maison de l’Ancre
marque un tournant dans l’œuvre de Georges Addor et dans l’architecture
genevoise. Récemment restaurée, elle est désormais inscrite à l’inventaire du
patrimoine protégé et récompensée par le Prix Patrimoine suisse Genève 2025.

Crédit image: Archives Jacques Bolliger / photo V. Bouverat.
Vue générale de l’Hôtel de l’Ancre en 1960 : l’édifice articule un prisme vitré dédié à l’hébergement sur un socle monolithique abritant les espaces communs.
Avec son mur-rideau qui confère au bâtiment son allure de
prisme vitré à l’américaine, l’Hôtel de l’Ancre, à Genève, marque un tourant
dans l’œuvre de Georges Addor. Réalisé à la rue de Lausanne, il constitue un
jalon essentiel de sa production, véritable prototype qui orientera de manière
décisive le langage architectural de l’architecte genevois.
L'architecture au service du social
Conçu et réalisé entre 1956 et 1959 aux Pâquis par les architectes Georges
Addor et Jacques Bolliger pour le compte du Département social romand, l’Hôtel
de l’Ancre offre à l’origine un lieu d’accueil pour les plus démunis. Situé à
l’angle des rues de Lausanne et de la Navigation, il se distingue par son
articulation en deux volumes aux programmes complémentaires: un prisme vitré
destiné à l’hébergement délicatement posé sur un socle monolithique dédié aux
espaces communs (restaurants et administration), référence incontournable à
l’iconique Lever House de New York (SOM, 1951-1952). Entièrement contrôlés, les
aménagements intérieurs et le mobilier sont dessinés avec soin par l’architecte
Hedwige Addor et offrent un écrin de choix aux œuvres artistiques de
Charles-Oscar Chollet et André Sangsue.

Crédit image: dmarchitectes/Hugo Dreneau.
L’entrée du restaurant se distingue par un espace en double hauteur, soulignant son caractère emblématique.
Le mur-rideau qui enveloppe les chambres est une
innovation emblématique, il marque le passage, chez Addor, d’une architecture
en maçonnerie à des volumes habillés d’une peau de verre. Ce choix technique
devient une signature de l’architecte et se retrouve ensuite dans de nombreux
projets emblématiques: ensemble Meyrin Parc, cité du Lignon, siège de Rolex,
Hôtel Intercontinental, Ecole de commerce de Saint-Jean, etc. Cette enveloppe
diaphane bénéficie de la technologie et de l’expérience de l’entreprise Guyot,
qui met en œuvre des fenêtres à caisson basculantes (de type Carda) posées sur
des allèges en verre émaillé, dont l’ensemble recouvre la structure de manière
lisse et continue.
Une transformation à vocation sociale
Racheté par l’Etat en 1983, l’Hôtel de l’Ancre désormais connu sous
l’appellation «Maison de l’Ancre», est géré depuis 2011 par les Etablissements
publics pour l’intégration (EPI) et accueille aujourd’hui des personnes en
situation de handicap psychique. Passablement transformé (hormis le
mur-rideau), le bâtiment fait l’objet, entre 2019 et 2023, d’une rénovation
sensible mêlant restauration attentive et restitution méticuleuse, opération de
sauvegarde exemplaire qui reçoit le Prix Patrimoine suisse Genève 2025.
La Maison de l’Ancre est désormais inscrite à
l’inventaire des immeubles dignes de protection, mesure qui lui permet de
bénéficier en outre des subventions à la restauration accordées par le
département du territoire.